Onze mars deux mille onze.
Ce jour-là deviendra l’une des dates clefs de l’histoire humaine si nous parvenons à éviter le pire… Aujourd’hui, un an après « Fukushima », ayons d’abord une pensée pour les victimes : morts, disparus, blessés, déplacés, irradiés… Un mot manque pour celles et ceux qui ont tout perdu, expropriés de fait, parce que leur lieu d’habitation n’existe plus, emporté par la vague, ou est situé dans une zone devenue impropre à la vie…polluée par la radioactivité.
Nous, humains, devons très vite inscrire cette date dans la mémoire universelle. Parfois aveuglés par des rêves prométhéens que nous croyons réalité, nous devons regarder ces montagnes de déchets, dont nous ne savons plus trop lesquels sont radioactifs au point que nous n’osons pas aller voir nos frères humains restés sur les lieux du désastre. Nous devons regarder ces villes englouties et les autres, vidées par l’ennemi invisible… « Tu n’as rien vu à Hiroshima » disait Marguerite Duras !
Une année s’est écoulée depuis le plus terrible enchaînement de catastrophes naturelles et technologiques. Les médias nous ont imposé un seul mot pour désigner l’ensemble : Fukushima. Est-ce un hasard ? Il y a un avant et un après Fukushima, preuve que la dimension technologique, la catastrophe nucléaire, est, à nos yeux, essentielle… Mais n’oublions pas le séisme d’une force rare, ses répliques innombrables et le raz de marée, qu’en japonais on nomme TSUNAMI, qui s’est attaqué à plus de 500 kilomètres des côtes nord-est du Japon. Nous ne devons pas nous habituer au pire, nous ne devons pas banaliser les catastrophes.
N’oublions pas non plus que Fukushima, ce n’est pas l’accident d’une centrale atomique, mais de quatre…
Comme toujours en cas de catastrophe majeure, les collectivités locales sont au premier rang. Tout étant dévasté, l’information parvient mal aux institutions plus éloignées et elles prennent de mauvaises décisions. Nos collectivités connaissent bien ces problèmes, elles qui sont appelées à établir des plans de sauvegarde et à tout prévoir … sauf que la catastrophe c’est aussi l’imprévisible… « Personne n’aurait pensé que »… Et lorsque l’on dit qu’un site militaire en milieu urbain pourrait devenir la cible d’un tir d’arme atomique, les regards se détournent. Bien des esprits se disant rationnels s’en remettent alors à la fatalité - en espérant qu’elle n’advienne jamais-. À Fukushima, les plans de sécurité n’avaient pas envisagé que certaines vannes essentielles doivent un jour être actionnées à la main. Qui aurait pensé que l’électricité manquerait dans une centrale qui… produit de l’électricité. Ne soyons pas aveuglés par la magie technologique. Tout notre monde peut cesser de fonctionner à la moindre panne générale d’électricité…
En présence de techniques aussi sophistiquées que celles de l’industrie nucléaire, il n’est plus possible de penser l’organisation du monde et l’organisation de nos collectivités territoriales comme elles étaient pensées avant l’apparition desdites technologies, et ce constat est encore plus fort quant ces techniques concernent l’armement. Or, nos schémas organisationnels, notre management (qui vient tout droit des manèges de nos armées quand elles utilisaient massivement les chevaux…), et aussi nos schémas intellectuels, culturels, conceptuels, quelque soit leur habillage et le verbiage qui les rend plus ou moins à la mode et médiatiques, tous ce qui nous anime, date finalement de temps plus ou moins lointains où les technologies nucléaires étaient inconnues et, par conséquent, cette nouveauté de la donne atomique devrait nous conduire à tout revoir, mais cela dépasse l’imagination de beaucoup…
L’expérience japonaise nous enseigne qu’il faut cesser de tergiverser et changer sans plus tarder l’organisation, la gestion et les modes de fonctionnement de nos institutions, de nos entreprises, de nos territoires car nul n’est à l’abri de l’imprévu, à fortiori quand cet imprévu l’est de moins en moins par la nature même des innovations technologiques mises en œuvre par nos soins sans les précautions nécessaires à la sauvegarde des humains, de leur santé, de leur environnement, de leur tranquillité…
Puisque nous connaissons les faiblesses de nos plans de sauvegarde, nous les acteurs locaux, nous devons nous faire « lanceurs d’alerte ».
Il faudra des décennies, voire des siècles pour traiter tous les effets des catastrophes, au prix de combien de nouvelles victimes ? Dans peu de temps les maladies engendrées par la radioactivité vont apparaître…
Il est encore temps de faire prévaloir la raison (« choisir entre l’enfer et la raison » disait Albert Camus, deux jours après Hiroshima). Nos communes, nos communautés de communes, d’agglomération, nos communautés urbaines, nos départements, nos régions ont le devoir de tenir ouvert ce dossier essentiel pour la vie humaine et l’avenir de cette vie, en hommage à toutes les victimes présentes et futures !
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